Le cheminement du héros: Retour: 6. La liberté de vivre

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jlFromLannion
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Le cheminement du héros: Retour: 6. La liberté de vivre

Post by jlFromLannion »

Ce billet fait partie de ceux consacrés au cheminement du héros (billet d'introduction), dont les différentes étapes sont:

CHAPITRE I: LE DEPART
1.L'appel de l'aventure
2.Le refus de l'appel
3.Une aide surnaturelle
4.Le passage du premier palier
5.Le ventre de la baleine

CHAPITRE II: L'INITIATION
1.La route des épreuves
2.La rencontre avec la déesse
3.La femme comme tentatrice
4.Réconciliation avec le père
5.Apothéose
6.L'ultime récompense

CHAPITRE III: LE RETOUR
1.Le refus du retour
2.La fuite magique
3.L'aide extérieure
4.Le passage du seuil de retour
5.Le maître des deux mondes
6.La liberté de vivre

Il fait suite au billet intitulé, "Le cheminement du héros: Retour: 5.Le maître des deux mondes".
Il s'agit du dernier billet de la série.

The hero with a thousand faces, p. 238
Quel est, à présent, le résultat de ce périple et de ce retour?
Le champ de bataille est symbolique de l'espace où la vie se déploie, dans lequel la vie de chaque créature se bâtit sur la mort d'une autre. La réalisation de l'inévitable culpabilité de la vie peut révolter le coeur, à tel point que, tel Hamlet ou Arjuna, on puisse refuser de continuer en sachant cela. De même, comme pour la plupart d'entre nous, il est possible d'inventer une fausse image de soi-même, une image finalement injustifiée de phénomène exceptionnel dans le monde, non pas coupable comme le sont les autres, mais justifié dans ses inévitables péchés par le fait de représenter le bien. Une telle image de vertu pour soi-même amène à une mauvaise compréhension, non seulement de soi-même, mais aussi de l'homme et du cosmos. Le but du mythe est dissiper le besoin d'une telle ignorance de la vie, en effectuant une réconciliation de la conscience individuelle avec le dessein universel. Et cela est réalisé à travers la prise de conscience de la véritable relation qui unit le phénomène transitoire du temps avec la vie impérissable qui vit et meurt en tout.
"De même qu'une personne jette des habits élimés et revêt des habits neufs, de même le Soi incarné abandonne les corps usés pour entrer en d'autres qui sont neufs. Les armes ne Le coupent pas; le feu ne Le brûle pas; L'eau ne Le mouille pas; le vent ne Le fatigue pas. Ce Soi ne peut être ni coupé, ni brûlé, ni mouillé, ni fatigué. Eternel, immuable, immanent, hors de tout changement, le Soi est le même de toute éternité." (Bhagavad-Gîtâ)
L'homme, dans le monde de l'action, perd le centrage fourni par le principe de l'éternité, s'il est anxieux pour le résultat de ses actes, mais s'il fait reposer ses actes, ainsi que leurs fruits, sur les genoux du Dieu Vivant alors, comme par un sacrifice, ils le libère des liens de la mer de la mort. "Fait sans attachement la tâche que tu as à faire. En déposant à mes pieds toute action, l'esprit concentré sur le Soi, libéré de la hâte et de l'égoïsme, combat, libre de tout affliction." (Bhagavad-Gîtâ)
Rendu puissant par cette réalisation, calme et libre dans l'action, empli de joie qu'à travers sa main puisse se déployer la grâce de Viracocha, le héros est le véhicule conscient de la terrible, merveilleuse Loi, que sa tâche soit d'être boucher, ouvrier ou roi.
The hero with a thousand faces, p. 243
[Le héros] ne confond pas l'absence de changement apparente dans le temps, pour la permanence de Ce Qui Est, et n'a pas non plus peur des moments à venir (ou de la "chose autre"), qui semble détruire le permanent avec son changement. "Dans tout l'univers, rien ne conserve sa propre forme. Mais la Nature, la formidable renouveleuse, refait toujours des formes à partir des formes. Soyez sûrs qu'il n'y a rien qui périt dans l'univers tout entier; cela ne fait que changer, et renouveler sa forme." (Ovide, Les métamorphoses) Ainsi, le moment suivant est autorisé à passer. Quand le Prince de l'Eternité embrassa la Princesse du Monde, sa résistance fut pacifiée. "Elle ouvrit les yeux, éveillée et le regarda avec amitié. Ensemble, ils descendirent les escaliers, le roi éveillé, et la reine, et la cour toute entière, et tous se regardèrent les uns les autres avec les yeux écarquillés. Et les chevaux se levèrent et s'ébrouèrent; les chiens de chasse sautaient, la queue frétillante; les pigeons sur le toit retirèrent leur tête de dessous leurs ailes, regardèrent les alentours, et s'envolèrent à travers le champ; les mouches sur le mur marchèrent à nouveau; le feu dans la cuisine gagna en luminosité, reprit sa danse et cuisit le dîner; Le rôti recommenca à griller; et le cuisinier donna au commis une gifle sur l'oreille qui tira un cri à ce dernier; et la servante finit de plumer le poulet." (Grimm)

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